Se livrer, partager son expérience avec l’endométriose n’est jamais un acte facile. Cela demande du courage.

L’endométriose n’est pas une maladie « visible », elle ravage les corps silencieusement. Le regard des autres qui ne comrpennent pas, les médecins qui minimisent parfois les douleurs et la sensation de toujours devoir faire semblant ajoute souvent un poids à la maladie. Vivre avec l’endométriose entraine une grande solitude. Un témoignage peut alors aider, apporter un soutien inattendu parce qu’en quelques lignes, on se se comprise. Cela offre aussi des pistes à l’entourage pour apporter un meilleur soutien.

Madeleine a décidé de prendre un stylo et de coucher sur le papier son parcours avec l’endométriose, les sentiments qu’elle a pu vivre, les difficultés qu’elle a traversés. Un écrit rempli de force et de courage qui pourra faire échos aussi bien aux femmes atteintes de la maladie qu’à leur entourage.

Se confier sur l’endométriose

Parler est un exercice difficile pour moi.

J’aborde rarement le sujet de l’endométriose et pourtant on me pose beaucoup de questions.

Ce matin, en lisant un témoignage, je me suis dis qu’il me faudrait du courage pour raconter une partie de mon histoire mais que ça pourrait faire connaître un peu plus cette maladie au quotidien, sans le côté médical.

Elle toucherait 1 femme sur 10… pourtant je ne connais personne d’autre personnellement ! Par pudeur, par peur, est-ce encore sujet trop tabou ? Certainement.
Je ne sais pas vraiment ce que j’attend de cette prise de parole qui me ressemble si peu, mais je crois que partager mon histoire m’aidera plus que je ne l’imagine. Il permettra aussi à certaines femmes de se sentir moins seule face à la maladie et aux sentiments qui y sont associés. C’est également un message important pour l’entourage, pour qu’il puisse mieux prendre en compte l’importance du soutien.

L’endométriose : le routard des hôpitaux

Cela fait 13 ans que je survis avec l’endométriose. Elle fait désormais partie de ma vie à part entière.

On commence tout juste à s’apprivoiser l’une et l’autre et à réussir à s’accepter, à vivre ensemble.

Avoir été opérée jeune à 14 ans et en urgence, a été une chance car après avoir dû affronter mes parents pour aller aux urgences, qui ne croyaient pas à de telles douleurs, cela a permis de poser un diagnostic et un début de traitement sans connaître les années d’errance médicale.

Mes douleurs ont toujours été minimisée par mon entourage, j’ai donc appris à vivre avec, refusant d’être douillette. Mais parfois celles-ci sont tellement intenses que je n’arrive plus à sourire et s’ensuivent de nombreux malaises.

Ma particularité ? Je pourrais écrire le guide des hôpitaux de France et de navare ! Les crises se déclenchent quand bon leur semblent ! Cela peut être n’importe où, n’importe quand !

J’ai donc été hospitalisée et opérée à de nombreuses reprises, en France, en Espagne, au Costa Rica, le jour de mon anniversaire, celui de ma Maman, complètement seule ou en pleine soirée festive avec des amis…

Mes opérations ont toutes été particulières et m’ont toutes beaucoup marquées, la plupart réalisées en urgence. L’une a été jeune, encore honteuse d’employer le mot ovaire, l’autre en voyage seule au bout du monde à tout juste 19 ans, une à peine quelques semaines après la précédente et dans une période très difficile de ma vie, j’ai donc choisi d’affronter la dernière seule. Ce que je retiens chaque fois c’est ce sentiment de solitude extrême lors de mes réveils.

Aujourd’hui, j’ai 27 ans, j’ai connu eu énormément de traitements et désormais je suis sous ménopause chimique artificielle, à coup d’injections régulières et de pastilles quotidiennes. C’est finalement ce qui m’a sauvé la vie.

Je ne suis plus réglée depuis mes 14 ans pour maitriser l’évolution de la maladie… une part de ma féminité partie en fumée.
J’en arrivais à de tels stades de douleurs que je m’empiffrais de cachets de façon déraisonnable, jusqu’à m’évanouir, à chercher à me bruler la peau, gardant des cicatrices, pour me provoquer une autre douleur et oublier un peu celle à l’intérieur.

Une colère intérieure

Vivre avec cette endo, c’est vivre en faisant souvent semblant. Semblant que tout va bien, que tout est sous contrôle.

J’ai la chance d’être très entourée par une famille nombreuse et une troupe de copains fidèles. Pourtant peu sont conscients des douleurs quotidiennes et des nombreuses questions que je me pose.

Parfois, je suis très en colère contre cette maladie mais aussi beaucoup contre eux. Je culpabilise énormément de cette rage en moi … La solitude est difficile dans les crises.

Durant ces fortes douleurs, j’aurais simplement besoin d’une présence rassurante. 

Pourtant quand je vais mal, j’entend d’une oreille les critiques, je vois l’agacement dans les yeux de mes parents, l’incompréhension dans ceux de mes amis ou juste le déni pour la plupart.
Dans ces cas là, je me surprend à rêver que l’endo devienne mortelle pour tout arrêter, ne plus souffrir de la douleur mais aussi du jugement des autres.

Heureusement certaines personnes réussissent à me faire sourire et rire malgré la douleur et sont très attentionnés, j’essaye donc de m’accrocher à eux. Je leur dis MERCI.
J’ai développé un grand dévouement pour les autres. C’est une certaine manière de prendre le dessus sur cette colère.
Je suis très sociable et hyper active… Une autre façon de contrer la fatigue extrême et le sentiment de solitude.

Une vie de couple interdite

Avec cette maladie, j’ai fait le deuil d’une vie amoureuse pour ne pas être égoïste et imposer cette maladie dite de couple à la personne et surtout ma phobie de l’infertilité.

Cette décision entraîne le célibat, pas toujours évident à assumer dans notre société et surtout l’impossibilité d’espérer une famille classique. Cela me revient parfois comme un boomerang déclenchant une douleur psychique si grande que mes larmes coulent durant des heures, moi qui dédie pourtant ma vie aux enfants.

Une vie sexuelle entachée par les multiples examens gynéco.

On peut considérer que ma première fois avait prédit la suite. Trop jeune, cela a été par une écho intravaginale très douloureuse. Exactement ce que l’on m’avait promis : un moment de tendresse, doux et amoureuse ! Désormais à chaque nouvelle écho, je pleure mais mes larmes ne déclenchent aucune émotion chez les médecins.

La nudité est devenue médicale pour moi, mon ventre seuls les médecins sont autorisés à le toucher. Et gare à celui qui s’y approche dans l’intimité, je bondi tel un chien enragé.

Une force au quotidien

Cette maladie finalement c’est une grande part de ma vie, une grosse partie pourrie de mon corps que je déteste. Mais je crois aussi qu’elle m’apporte beaucoup de force de caractère tous les jours.

Je me suis construite adolescente et jeune adulte avec. L’envie de prendre ma revanche est immense.
Et aujourd’hui j’essaye d’être fière de moi, de mon corps qui a subi de nombreux traumatismes, d’affronter les douleurs quotidiennes, de dépasser ma fatigue extrême entraînée par l’inflammation et de m’efforcer chaque jour d’offrir le meilleur de moi même.

Merci l’endométriose

Les longues journées passées seule au lit ou à l’hôpital trop affaiblie, m’ont aussi permis d’avoir beaucoup de temps pour réfléchir à de nombreux sujets, réfléchir au bonheur.

J’ai alors pu comprendre que le bonheur pour moi serait différent de la norme, adapté à mon endo-vie.
Cette vie me permet d’avoir beaucoup de temps pour mon entourage, faire du volontariat ou développer ma créativité, prendre du temps pour mes passions ou encore me former dans mon métier !

Des projets de vie j’en ai pleins la tête (voyager, être bénévole, m’occuper d’enfants, adopter, organiser des moments entre amis et en famille …) et j’ai hâte d’en réaliser une grande partie ! La plupart ont finalement germé dans ma tête grâce à cette maladie qui m’a permis de beaucoup penser, comprendre l’essentiel, m’entourer des bonnes personnes.

Des solutions

J’ai beaucoup de mal à écouter mon corps encore aujourd’hui puisque chez moi se plaindre est synonyme de faiblesse donc on essaye de souffrir en silence. Mais j’apprend petit à petit, de mieux en mieux, j’ai découvert le yoga qui me fait beaucoup de bien, je m’autorise les calmants en cas de crises.

Mes objectifs seraient de réussir à mettre en place une véritable alimentation anti-inflammatoire, savoir mettre des limites à mon hyper activité lorsque je sens que mon corps m’envoie les signaux d’alerte et réussir à envoyer balader les gens qui ne me sont d’aucun soutien en cas de faiblesse.

L’importance du soutien dans la maladie

Durant les 5 années précédentes, j’ai beaucoup lu de témoignages, et durant mes crises, cela m’a aidé à me sentir moins seule.

Alors si une endo girl me lit aujourd’hui : sache que l’on s’en sort et qu’on peut être très heureuse malgré la maladie mais surtout n’oublie pas d’être fière de toi !!! Tu surmontes la maladie et gères les douleurs à ta façon, ne laisse personne minimiser ce que tu vis.

Si tu fais parti de l’entourage d’une endo girl, ne la lâche pas, ne la juge pas, ne lui dis pas ce qu’elle doit faire et simplement confirme lui que tout ira bien, apporte lui une bouillotte et fais la sourire à la vie !

 

Madeleine

Vous souhaitez partager votre expérience ?

Parce qu’il y a autant d’endométrioses qu’il y a de femmes, raconter son histoire, partager un bout de vie peut aider une personne ou alerter son entourage.
Alors, parlons d’endométriose !